09/07/18
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Des chercheurs du Laboratoire de nanochimie de l’Institut de science et d’ingénierie supramoléculaires (Université de Strasbourg / CNRS), en collaboration avec l’Université de Mons (Belgique), l’Université Humboldt de Berlin (Allemagne) et l’Université de Trente (Italie), ont créée des réseaux moléculaires photocommutables sur des matériaux bidimensionnels et les ont exploités pour fabriquer des dispositifs hybrides de haute performance dont la réponse électrique peut être contrôlée par la lumière. Ces résultats sont publiés ce 9 juillet 2018 dans la revue Nature Communications.
En raison de leurs propriétés électriques, optiques, chimiques et thermiques exceptionnelles, les matériaux bidimensionnels (2D), qui sont constitués d’une seule couche d’atomes, présentent un grand intérêt pour des applications technologiques comme, entre autres, les composants électroniques, les capteurs, les catalyseurs ou encore les dispositifs de conversion et de stockage d’énergie. Grâce à leur surface ultra-sensible, les matériaux 2D offrent une plateforme idéale pour étudier le lien qui existe entre l’assemblage nanométrique de molécules sur une surface et le transport électrique macroscopique dans un dispositif.
Afin de conférer aux dispositifs une sensibilité à la lumière unique, les chercheurs ont conçu et synthétisé une brique moléculaire photocommutable de type spiropyrane équipée d’un groupe d’ancrage et qui peut être interconvertie de manière réversible entre deux formes distinctes par illumination avec respectivement de la lumière ultraviolette et visible. Sur la surface d’un matériau 2D comme le graphène (composé uniquement d’atomes de carbone) ou le disulfure de molybdène (de formule MoS2), les molécules photosensibles s’assemblent spontanément en couches ultra-minces et très ordonnées, formant ainsi un réseau hybride avec une précision atomique. Lors de l’illumination, le système subit un réarrangement structural collectif des molécules qui peut être directement visualisé et suivi avec une résolution sub-nanométrique par microscopie à effet tunnel. Cette réorganisation induite par la lumière au niveau moléculaire entraîne une modulation optique des niveaux d’énergie électronique du matériau 2D sous-jacent, ce qui se traduit par un changement dans les caractéristiques électriques des dispositifs hybrides fabriqués. À cet égard, la nature collective de l’auto-assemblage permet de convertir des événements moléculaires en une action de commutation homogène dans l’espace qui produit une réponse électrique macroscopique dans le graphène et le MoS2.
Cette approche innovante et polyvalente fait passer l’électronique supramoléculaire au niveau supérieur grâce au contrôle total de la relation entre architecture et fonction dans les matériaux 2D obtenus par ingénierie moléculaire. Ces résultats sont d’une grande importance pour la réalisation de dispositifs hybrides multifonctionnels de haute performance répondant à la source d’énergie la plus abondante et la plus puissante offerte par la nature – la lumière.
Référence
Marco Gobbi, Sara Bonacchi, Jian X. Lian, Alexandre Vercouter, Simone Bertolazzi, Björn Zyska, Melanie Timpel, Roberta Tatti, Yoann Olivier, Stefan Hecht, Marco V. Nardi, David Beljonne, Emanuele Orgiu & Paolo Samorì
Collective molecular switching in hybrid superlattices for light-modulated two-dimensional electronics
Nature Communications, 9 juillet 2018
A propos de Paolo Samorì
Professeur à l’Université de Strasbourg, Paolo Samorì est également directeur de l’Institut de science et d’ingénierie supramoléculaires (ISIS), une unité mixte de recherche du CNRS et de l’Université de Strasbourg où il dirige le laboratoire de Nanochimie. Ses recherches portent sur la chimie des matériaux bidimensionnels, les systèmes supramoléculaires intelligents ainsi que les matériaux et les (nano)dispositifs de haute performance. Il a récemment été récompensé pour ses travaux par la Royal Society of Chemistry qui lui a décerné le prix Surfaces et interfaces 2018.